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  • Photo du rédacteurSauvane Delanoë

Aujourd’hui, c’était la rentrée…

Quand on termine ses études, on croit que ce vilain mot ne fera plus jamais partie de notre vocabulaire. Et puis on s’aperçoit que si…

Même adulte, quand on est passé aux agendas de janvier à janvier plutôt qu’à ceux de septembre à septembre, quand on a plus de fournitures scolaires à s’acheter, quand on est libérés de l’angoisse de rencontrer les « nouveaux » de l’année, ou d’être soi même un « nouveau », quand on ne se demande plus si Josiane aura plus grandi que nous ou si Albert sera débarrassé de son acné, quand on a peur que Jules nous ait oubliée après un mois au Camping à flirter avec de jolies allemandes, on est malgré tout et malgré soi toujours confrontés à ce vilain croque-mitaine de la Rentrée…

Du marronnier des JT, aux panneaux plus ou moins drôles qui fleurissent sur les réseaux sociaux, tout nous rappelle cette appréhension saisonnière d’enfance…

Certes on n’a pas l’angoisse de se demander si untel ou unetelle a passé de meilleures vacances que nous, puisqu’on a partagé leurs mojitos et leurs coups de soleil par Facebook interposé, et savouré leurs barbecs entre amis sur Insta… et qu’on leur a imposé les plages qu’on a visité, et nos cocktails en terrasse…

Mais quand même, c’est le premier lundi de Septembre, on s’attend à la pluie, à la morosité, et surtout à la perspective de ces onze mois entiers sans grandes vacances qui se profilent à l’horizon.

On se croyait reboostés, alors qu’on est déjà fatigués…

Du coup je tente fourbement depuis de nombreuses années de prendre mes vacances (aussi courtes soient-elles) en Septembre, alors même que les autres débronzent et ont la nostalgie de leurs grasses matinées.

Mais voilà, comme toute bonne grande personne dans la norme qui se respecte (en voilà tout un tas de vilains mots), j’ai mis au monde un petit bonhomme qui, lui, compte ses années de Septembre à Septembre depuis son entrée en Petite Section.

Ce petit être a été tellement malheureux à l’école, qu’il est aujourd’hui en cours par correspondance, ce qui nous permet encore cette rébellion vacancière de début septembre… un peu comme dans la pub pour le loto où une seule voiture va vers le soleil tandis que la cohorte des aoûtiens traîne ses diesels vers les villes grises…

Mais voilà, même par correspondance, mon Boulon fait sa rentrée.

Et avec elle arrive son lot d’angoisses. La peur de la nouveauté, la peur de l’échec, la peur d’être dépassé par l’ampleur de la tâche qui l’attend, la peur de la mauvaise note, la peur de l’engueulade….

Un poids bien lourd pour de petites épaules qui ne devraient être faites que pour bronzer au soleil, et avec les quelles il préfère porter les sangles de sa basse que celles d’un cartable!!! C’est une image bien sûr puisqu’à la maison, pas de cartable… mais je vois dans ses yeux pleins de questions à quel point ses craintes sont plus lourdes que des livres…

Alors remontent en moi, comme un désagréable reflux acide, tous ces blues de rentrée… ces 12 mois de septembre qui ont plombé mon insouciance le long de ma scolarité… ces préaux comme des arènes où il fallait trouver sa place au milieux des fauves que les enfants savent si bien être les uns pour les autres… ces règles indigestes, ces référentiels bondissants et autres blocs mucilagineux à effet soustractif… mais ça je ne le lui dis pas… je l’écoute, je le rassure, je le guide, et je prends ses peurs sur mes épaules comme je prenais mon cartable. Ça ne me fait pas mal au dos, ça me fait mal à l’âme.

Bien sûr demain je lui dirai à quel point l’école, chez soi ou dans une classe, c’est merveilleux. À quel point lire, écrire et compter rendent libre. À quel point l’Histoire vous en apprend sur le présent et à quel point la Géographie invite aux voyages. À quel point les rédactions sont les promesses des chansons qu’il écrira plus tard. À quel point les sciences poussent à l’émerveillement de la Terre de ses mystères de ses richesses… À quel point les nouveaux amis qu’il rencontrera dans ses diverses activités l’ouvriront au monde, à la découverte de l’autre, au respect, à la tolérance. À quel point avoir le droit d’apprendre est un cadeau inestimable. À quel point il a de la chance d’être dans un pays, dans une vie qui le lui permet. Et peut-être même qu’il me croira.

Bien sûr, demain je lui dirai tout ça.

Mais pas aujourd’hui.

Aujourd’hui, c’était la rentrée…

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